Le 27 décembre 2024,
Monsieur le Premier ministre,
Au moment où vous prenez vos fonctions au sein du gouvernement actuel, vous faites l’objet d’une campagne de haine d’une rare intensité. Sans doute, nous direz-vous, ce n’est pas la première, et l’homme d’expérience que vous êtes s’est assurément accoutumé aux saillies, y compris antisémites[1], et aux insultes les plus basses, comme celle que vous a adressées, en direct, un auditeur de France Inter le mardi 24 décembre 2024.
Ce matin-là, et les jours qui ont suivi, celles et ceux qui ont cautionné l’usage d’un tel langage à l’encontre d’un ministre de la République ont accepté le principe de la généralisation de la violence verbale. Triste signe des temps, ils ont bénéficié, en cette occasion, de la parole d’autorité de quelques élus de la République qui, en applaudissant à l’insulte, ont cautionné le fait que l’on puisse recourir aux mots les plus orduriers à l’endroit d’un serviteur de l’État.
Préférant l’invective au discours argumenté, ils ont ainsi piétiné les règles démocratiques et contribué à dégrader nos institutions, garantes de nos libertés et de la citoyenneté. Ils ont, en d’autres termes, exprimé une préférence assumée pour la subversion qui fait, nous le savons, le lit des pratiques autoritaires que ces mêmes insulteurs prétendent pourtant combattre.
Nous ne pouvons nous résigner à accepter l’inscription dans notre paysage politique de ces méthodes, lesquelles, à travers un homme, nous menacent collectivement. Nous dénonçons avec force cette hypocrite rouerie consistant à dénoncer la violence des autres et à s’autoriser l’injure et la diffamation. Nous savons, à la Licra, que les mots sont des fusils chargés comme nous savons l’atmosphère politique pesante qui est aujourd’hui la nôtre. Ces deux constats devraient collectivement nous inciter à plus de responsabilité et à placer, en toutes circonstances, l’intérêt général au cœur de nos préoccupations. Il en va de l’avenir de notre vie démocratique, de la République et de la France.
Monsieur le Premier ministre, la Licra vous adresse tout son soutien face à ces attaques qui déshonorent en premier lieu leurs auteur(e)s. Nous n’oublions pas vos combats sincères et énergiques en faveur de la laïcité, votre engagement sans faille contre le racisme et contre l’antisémitisme. Nous n’oublions pas non plus l’action qui a été la vôtre à l’encontre du terrorisme et du séparatisme. C’est en vertu de cet engagement et de cette expérience que la Licra vous avait accueilli parmi ses membres d’honneur en 2021.
Vous savez, Monsieur le Premier ministre, que vous nous trouverez à vos côtés, comme nous le fûmes par le passé, pour approfondir ces missions, œuvrer à l’égalité des hommes et des territoires, et y affirmer le rôle et la place de l’État.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Premier Ministre, l’expression de notre très haute considération.
La LICRA
[1] Intervention du député LFI Hadrien Clouet sur France Info, le 23 décembre 2024 : « Si vous en êtes à rappeler Manuel Valls, c’est que même Judas n’était pas disponible. »
