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Le procès Eichmann à Jérusalem

Festival d’Avignon 2021. Du 7 au 30 juillet à 19h00 (relâche les mardis 13, 20 et 27) • Théâtre des Halles, rue du Roi René • Durée : 1h20. D’après Joseph Kessel. Adaptation, mise en scène et interprétation Ivan Morane. Réalités / Compagnie Ivan Morane.

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Courez-y d’abord pour Joseph Kessel. Si chacun se souvient du romancier des Cavaliers ou du Lion ou du coauteur du Chant des partisans, combien lisent encore le grand reporter et connaissent par exemple les articles, stupéfiants de puissance et de profondeur psychologique, qu’il consacra à Eichmann au moment de son procès 

Courez-y ensuite pour Ivan Morane. Tout à la fois adaptateur, metteur en scène et interprète de ce qui sera, de son propre aveu, le dernier spectacle de sa compagnie, il aborde un thème qui le touche de trop près pour qu’il ait jusqu’ici osé s’en approcher. Il entre en scène, prête sa voix à Joseph Kessel, et immédiatement ce concentré de douleur, cette horreur presqu’incrédule que lui inspirent le chef nazi et le cynisme tranquille de sa ligne de défense, cette volonté de témoigner devant l’histoire au nom de six millions de victimes dont la souffrance l’ont porté, en secret, durant toute sa carrière théâtrale, tout cela nous saisit d’emblée et ne nous lâchera plus durant les 80 minutes que dure le spectacle. Ivan Morane est servi dans son entreprise par une mise en scène d’une incroyable sobriété et une scénographie minimaliste d’une étonnante efficacité (un magnétophone des années 60 et surtout la cage de verre à l’épreuve des balles qui protégeait Eichmann durant toute la durée de son procès).

Courez-y enfin, si l’on ose dire… pour Eichmann lui-même, dont Joseph Kessel et son porte-parole Ivan Morane nous offrent une vision très différente de celle que proposait Hanna Arendt : ce bourreau élégant et cultivé, responsable en dernière instance du plus épouvantable massacre dont l’Histoire ait gardé la mémoire, illustre peut-être la « banalité du mal » mais ne saurait se limiter à cette approche qui semble gommer la monstruosité irréductible du personnage.

Abraham Bengio


Joseph Kessel, écrivain et journaliste, a relaté quotidiennement pour le journal France soir le procès Eichmann durant les trois mois au cours desquels le dignitaire nazi a été jugé à Jérusalem en 1961

Ces chroniques, qui ont fait l’objet d’une publication à l’époque, sont portées sur la scène du théâtre des Halles par Ivan Morane, adaptateur, metteur en scène et interprète de ce spectacle.

Le texte de Kessel, remarquable, nous fait entrer dans ce procès par la vision qu’il a d’Eichmann et de son rôle dans la solution finale, bien loin du simple exécutant qu’il affirme être.

Kessel a perçu l’essentiel de ce procès, de l’accusé Eichmann aux procureurs et aux juges qui vont démontrer la part jouée par Eichmann dans l’extermination du peuple juif mise en œuvre par les nazis.

C’est aussi la vision d’un journaliste et écrivain, d’un homme qui s’est engagé dans la Résistance durant la guerre.

Hypersensible, cherchant à comprendre, il décrit Eichmann dans sa cage de verre, ses tics, son visage anguleux, ses lèvres fines et on le voit apparaitre devant nos yeux.

Peu à peu s’esquisse le portrait d’un criminel imperméable à la culpabilité.

L’interprétation du texte de Kessel par Yvan Morane est remarquable de justesse et de sensibilité toute en nuance

Voilà un spectacle salutaire dans le contexte actuel de résurgence de l’antisémitisme.

Nicole Chouchena

Licra – Avignon 2021

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